vendredi 27 février 2009

Le non-théâtre

Le théâtre est l'art de la représentation dramatique. Par définition, une représentation est une séance ouverte aux spectateurs et réalisée par un artiste ou une troupe d'artistes.

Pourquoi se limiter à la séance?
Pourquoi une pièce doit-elle avoir un début et, surtout, une fin?

En se posant des limites, de façon générales pour l'écriture, on empêche notre âme de se laisser aller à l'écriture pleine qui apportera des textes purs (et je ne parle pas ici de contraintes volontaires comme la rime ou de respecter un certain style). Dans le cas présent, on parle de limites qui sont imposées par le style; c'est à dire qu'une pièce de théâtre doit avoir un début et une fin.

Parfois, en théâtre contemporain, on voit des pièces sans coupures au début; c'est à dire que les personnages sont déjà sur scène, et que le rideau est levé. C'est déjà un pas en avant. Cependant, toutes les pièces ont une fin, et cela me désole.

Un poème ou une toile n'a ni début, ni fin, et est intemporel. On peut le lire ou le regarder à l'envers, prendre bien le temps de l'ausculter, réfléchir à ses différents sens, mais surtout ne pas ressentir de coupure entr ele monde du réel et l'oeuvre.

À la fin d'une pièce, lorsque le rideau tombe, c'est le retour à la vie réelle, et tout ce qui a été dit pendant la pièce reste coupé du monde réel. Le spectateur oublie la raison d'être de la pièce en même temps que le rideau le coupe d'elle. En laissant tomber le rideau, on coupe la pièce de la réalité, alors que c'est un défaut de cette même réalité qui a inspiré le dramaturge, ainsi que les acteurs, le metteur en scène, les éclairagistes, etc.

Le non-théâtre (ou surthéâtre) n'est rien d'autre qu'une pièce de théâtre "ordinaire" de laquelle on a supprimé la séparation entre le monde réel et celle-ci, par un moyen quelconque. Que ce soit en en supprimant la fin, ou par n'importe quel autre moyen imaginable. Par ce procédé, on peut illustrer un désir de vouloir impreigner la réalité de la circonstance de la pièce dans la tête des gens. Il ne faut donc pas trop se laisser aller dans la fiction si on fait du non-théâtre, car ça ferait ré-apparaître cette notion de coupure entre le réel et la pièce.

2 commentaires:

  1. *imprégner
    Un poème a un début et une fin ; le quatorzième vers d'un alexandrin constitue une chute, la chanson est clairement narrative, la ballade suit une structure bien déterminée, rendant l'inversion impossible et insensée... Les exceptions ne sont que le fruit de laborantins de la poésie, très très loin de résumer toute l'histoire de la poésie. Même les poèmes de Beckett ont un début et une fin! C'est dire... Quant à la peinture, la sculpture, le problème est sans doute plus complexe, mais mériterait aussi quelques nuances. Impossible de nier qu'une grande partie de la peinture est régie par le mouvement, donc la narration, que ce soit celle d'une histoire ou d'une âme : on va quelque part. Toujours des exceptions, bien sûr.
    Esthétiquement, la suppression de la fin au théâtre existe : le rêve de Ionesco pour la Cantatrice chauve, les pièces a-narratives de Lars Noren comme Tristano ou Crises que l'on peut prendre dans un sens ou dans l'autre et lire dans le désordre sans avoir davantage l'impression d'une rupture dans la situation. Mais le vrai problème, et c'est bien ce que Ionesco déjà regrettait, c'est qu'il faut applaudir les acteurs, donc que les personnages redeviennent les gens qui les jouent. Grandeur du cinéma où ne figurent que les noms des acteurs, sans que ceux-ci soient incarnés comme personnes réelles ayant joué un simple rôle. Justesse d'Artaud : le seul vrai théâtre est celui de la vérité. Il n'y a pas de début ou de fin quand on observe la rue via une vitre teintée. On n'applaudit quand les acteurs quand il n'y a plus que des acteurs. Le personnage sacrifié sur scène rejoint l'acteur. Le seul vrai théâtre, le sacrifice sur scène.

    RépondreSupprimer
  2. Drôle de commenter un texte presque 3 ans, jour pour jour, après sa publication.

    C'était une connerie de jeunesse, je ne connaissais qu'encore moins que ce que je sais maintenant. Beaucoup moins.

    Anonyme, écris moi, c'est intrigant, tout ça.

    - SS

    RépondreSupprimer